Chronique du Nord
Un peu d'errance
et de folie
Philipp Kocks · Directeur de la communication à deMens.nu
Avec la rédaction1
Mise en ligne le 12 avril 2022
Attirer plus de jeunes : un leitmotiv fréquemment entendu dans le monde associatif qui place régulièrement cet objectif à atteindre dans leur plan d’action. C’est aussi le cas à deMens.nu. où, depuis plusieurs années, des conseillers tentent de construire une véritable « marque jeunesse » ciblée et pensée avec les codes de cette
génération.
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Depuis l’arrivée des conseillers jeunesse, les projets poussent comme des champignons. Il suffit de penser à Taboebrekers en Flandre occidentale, une série de podcasts sur les nouvelles formes de liens, ou à Erdoorheen au Limburg, qui a pour but de discuter du bien-être mental chez les jeunes. Ces projets seront bientôt couverts par Dwaalzin, la marque jeunesse de deMens.nu. Que devons-nous imaginer lorsque nous entendons l’expression « marque jeunesse » ? Nous avons interrogé Annouk Brebels, coordinatrice jeunesse, et Jelle Hermans, consultant jeunesse.
Pourquoi est-il nécessaire de créer une « marque » pour les jeunes ?
Annouk Brebels : Pour atteindre vos groupes cibles, il faut segmenter. Le plan de nombreuses associations est de toucher plus de jeunes, mais cela n’est possible que si vous communiquez également dans leur langue. Et je ne parle pas seulement du choix efficace des mots, les codes et la convivialité de votre communication jouent aussi un rôle. Vous pouvez sans risque être un peu plus radical, plus incisif avec eux. En outre, nous pensons qu’il est important non seulement d’atteindre les jeunes, mais de construire une communauté de jeunes humanistes libéraux. Nous voulons qu’ils puissent se lancer dans un environnement dans lequel ils se sentent bien.
Jelle Hermans : La « communauté » est en effet un terme crucial dans ce projet. Nous avons mis en place beaucoup d’activités pour les jeunes avec les consultants, mais beaucoup d’entre eux sont autonomes, ce qui ne favorise pas vraiment la connexion recherchée. En regroupant tous les projets et activités sous une même thématique, nous pouvons travailler au-delà des frontières municipales et provinciales
C’est donc une plateforme pour et par les jeunes. À quoi peuvent-ils s’attendre lorsqu’ils s’y connectent ?
Jelle : Il y a plusieurs aspects à Dwaalzin. En ligne, les jeunes peuvent trouver une plateforme Web avec toute une gamme d’activités et de projets dans lesquels s’engager. Il y a également beaucoup d’informations et de ressources disponibles, avec une diversité d’opinions proposées. À terme, ils pourront aussi se lancer dans la production de contenus et monter eux-mêmes des projets.
En dehors d’Internet, nous voulons former une grande communauté où les jeunes peuvent expérimenter, créer ou simplement s’engager au sein d’un environnement sûr. Nous le décrivons toujours comme un endroit où tout le monde peut apporter son grain de folie, mais avec un recours possible auprès de personnes de confiance si nécessaire.
Annouk : C’est aussi un peu pour beaucoup de jeunes, comme venir à la maison. Nous avons remarqué qu’un nombre important de nos projets portent sur des tabous. Les jeunes souhaitent parler ouvertement de plein de choses, mais ne sont pas toujours entendus. Nous espérons qu’en venant à Dwaalzin, ils éprouvent le sentiment de pouvoir y déposer ce qu’ils ont sur le cœur, en toute confiance.
L’engagement volontaire des jeunes puise ses racines dans des évènements qui les touchent personnellement. À l’humanisme et à la laïcité de leur parler.
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Dites-nous en plus sur le nom Dwaalzin (contraction de dwalen qui peut se traduire par « errer » et waanzin qui signifie « folie », NDLR).
Jelle : Ce nom est né suite à une collaboration avec l’agence de communication avec laquelle nous avons commencé à travailler. Ils sont partis d’une analyse de nos ambitions et ont fait un certain nombre de propositions. Le nom Dwaalzin a immédiatement semblé être le choix idéal pour nous tous, notamment en raison de la multitude de significations qu’il contient.
Annouck : En effet. Dwaaller est un mot ancien qui désigne une philosophie qui s’écarte de la norme. Pour l’athéisme et l’humanisme libéral, ce fut bien sûr le cas pendant longtemps. Mais Dwaalzin fait aussi référence à l’errance. En tant que jeune, vous ne savez souvent pas qui vous êtes, et encore moins dans quelle direction vous devez aller. Cela nous convient parfaitement. Le travail des conseillers jeunesse est de les aider dans ce domaine. La philosophie humaniste libérale se reflète donc également dans le nom de cette marque jeunesse.
L’humanisme libéral évoque probablement quelque chose de différent pour chacun, et ce sens dépend aussi de l’air du temps et de la génération à laquelle vous appartenez. Que signifie l’humanisme libéral pour les jeunes d’aujourd’hui ?
Anouk : Dans le passé, la majorité catholique fortement cloisonnée dans ce pays a été combattue très férocement. Je pense que, grâce aux générations plus âgées, bon nombre des points de discorde ont été plus ou moins compris. Beaucoup de jeunes sont aujourd’hui laïques, mais cela signifie aussi qu’ils sont aussi en quête de sens. Ils se sentent souvent connectés aux valeurs de l’humanisme libéral, mais ils ne s’y identifient pas forcément. Avec Dwaalzin, nous voulons dire qu’ils ne sont pas seuls dans cette quête d’identité.
Jelle : Tant qu’on ne leur met pas trop d’étiquettes et qu’on leur donne la possibilité de s’épanouir, beaucoup de jeunes seront certainement d’accord avec les valeurs que notre communauté entend faire rayonner.
Rallier les jeunes : le défi est de taille et commun à tout le secteur associatif.
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L’intention est-elle également de travailler de manière intergénérationnelle ou la « marque » s’adresse-t-elle uniquement aux jeunes ?
Annouk : Au départ, l’intention est de se concentrer sur les jeunes. Mais une fois la communauté resserrée, on pourra penser à la suite. Les jeunes qui, par exemple, souhaitent s’engager auprès de deMens.nu ou d’une des associations membres ont naturellement toute latitude pour le faire.
Jelle : Je m’attends à ce que nous découvrions un énorme potentiel chez les jeunes qui nous rejoignent. De cette manière, l’expérience, les connaissances et l’histoire de la communauté humaniste libérale pourront également être liées à leur vision du futur.
Annouk : De cette façon, vous obtenez effectivement une interaction qui peut aider deMens.nu à développer des positions et des campagnes. Les jeunes acquièrent alors aussi une voix claire dans l’évolution de l’humanisme libéral.
Vous appartenez vous-même au groupe cible de Dwaalzin, pour le moment en tout cas. Comment voyez-vous le monde dans cinquante ans ?
Annouk : Je pense que bon nombre des sujets tabous sur lesquels nous travaillons actuellement seront normalisés d’ici là. Je pense, par exemple, à l’ouverture envers des thématiques comme la sexualité ou des modèles de famille différents. Mais à ce stade, nous aurons peut-être de nouveaux domaines à explorer, donc le travail ne sera pas terminé dans cinquante ans. Certaines choses reviendront probablement toujours. Les jeunes sont naturellement plus radicaux dans leurs opinions et cela se reflète aussi dans leur façon de vivre. Les formes de vie stéréotypées changeront fondamentalement et l’évolution de notre activité deviendra également de plus en plus évidente. Aujourd’hui, nous constatons que de nombreux jeunes sont aux prises avec cela lorsque leur travail ne leur donne pas satisfaction.
Jelle : Je n’ai aucun problème à ce sujet (rires) !
Hujo : esprits libres en culture
Charlotte Spaas est bénévole chez Hujo, une association pour les jeunes créée à Anvers en 1958 dans l’optique d’encourager l’esprit critique. Dans le cadre du projet ‘t Vrije Brein, elle organise des conférences et des débats. Joke Goovaerts, chargé de communication à deMens.nu, l’a rencontrée2.
Comment êtes-vous arrivé chez Hujo en tant que bénévole ?
Via Facebook, j’ai vu qu’Hujo organisait une soirée au centre libéral De Schakel à Malines avec une conférence aux chandelles et une discussion libre par la suite. C’était une session de ‘t Vrije Brein et cela m’a plu. J’aime me surprendre de temps en temps en allant dans un endroit où je ne connais personne. Ce fut une excellente soirée et les personnes présentes étaient très ouvertes d’esprit, amicales et chaleureuses. Un mois plus tard, j’y suis retournée et quelqu’un d’Hujo m’a demandé si je voulais faire du bénévolat.
Quelles sont vos missions en tant que bénévole ?
Nous recherchons de jeunes intervenants qui peuvent donner une conférence sur des sujets qui ne sont pas souvent abordés. Nous cherchons aussi un lieu où les accueillir et veillons à ce que tout soit prêt pour recevoir le public le jour J. L’esprit libre est quelque chose qui me correspond et que j’aimerais développer. Je suis également membre du conseil d’administration.
Quels sujets vous intéressent ?
Je suis fascinée par les gens en général et le comportement humain, ainsi que par la science et d’autres sujets philosophiques. J’ai un large éventail d’intérêts, j’essaie de ne pas me limiter à certains thèmes.
Quelle est votre motivation personnelle en tant que bénévole ?
J’aime vraiment faire du bénévolat. Vous faites partie d’un groupe d’individus partageant les mêmes idées et vous travaillez collectivement à atteindre un but. Au départ du développement d’une idée, vous obtenez rapidement un résultat. Vous rencontrez aussi de nouvelles personnes inspirantes. Vous bénéficiez de soutien social. Cela me motive également de faire quelque chose de positif pour le secteur du bien-être mental. Surtout après le coronavirus, nous devons être solidaires, construire de belles choses ensemble. Le bénévolat est important dans ma vie, ça lui donne du sens. Je suis psychologue, mais j’ai choisi de travailler en quatre cinquièmes. Parfois, combiner mon métier et tout ce travail bénévole, c’est un peu beaucoup, mais j’ai du mal à dire non.
Comment motiveriez-vous les gens à faire du bénévolat ?
Quand j’ai reçu votre demande pour cet entretien, j’ai immédiatement pensé que je devais y répondre, parce qu’en parler peut motiver les autres. Être bénévole ajoute vraiment quelque chose à votre vie. Vous faites quelque chose pour les autres, pour les enfants, pour la nature. Cela me procure une grande satisfaction et cela m’apprend quelque chose sur moi-même et sur le monde.
- Cet article est une adaptation en français de Philipp Kocks, « Dwalen is toegestaan, het is volledig oké », dans deMens.nu Magazine, 10e année, no 4, novembre 2021. Il est publié ici avec l’aimable autorisation de son auteur et de deMens.nu.
- Cette interview est une adaptation en français de Joke Goovaerts, « Vrijwilligers bij Hujo », dans deMens.nu Magazine, 11e année, no 1, janvier 2022. Il est publié ici avec l’aimable autorisation de son auteur et de deMens.nu.
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