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La mafia des mollahs

Par François Finck · Délégué « Europe & International » au CAL/COM

Mise en ligne le 1er avril 2024

 Et si l’Iran était aujourd’hui la première organisation criminelle au monde ? »

Le régime islamique iranien montre tous les jours sa face visible, faite de répressions et d’assassinats. Le 23 mars dernier encore, une jeune femme, Sarah Tabrizi, a été assassinée par le régime. Cet appareil de répression est soutenu par une toile d’activités mafieuses.

Dans cette enquête très détaillée, le grand reporter Emmanuel Razavi montre tout ce qui est derrière les scènes. Notamment les trafics de drogue, d’armes, d’êtres humains et le proxénétisme, et d’autres activités criminelles des Gardiens de la révolution. La conclusion est sans appel : la République islamique est un « narco-État », un « État islamique qui tient du régime nazi et de la famille Corleone ».

Ces activités servent à financer les gardiens, un véritable État dans l’État, qui contrôle 60 % de l’économie, et exerce une influence considérable sur le pouvoir. Les gardiens sont sous l’autorité directe du Guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei. Ils sont le bras armé du régime.

Enquêter sur leurs activités clandestines comporte des risques, Emmanuel Razavi le sait bien. Il a rencontré des opposants iraniens, des gens qui documentent les activités criminelles des pasdarans au péril de leur vie. Le livre est riche de la variété de ces témoignages et entretiens menés par l’auteur dans des conditions de discrétion et parfois de secret dignes d’un roman d’espionnage. Son enquête a conduit Emmanuel Razavi dans le golfe Persique, en Israël, dans les montagnes du Kurdistan irakien, où il a rencontré de jeunes Iraniennes et Iraniens qui ont fui les persécutions du régime, et ont rejoint la guérilla kurde dans l’espoir de mettre fin au pouvoir des mollahs.

Avant de détailler les diverses turpitudes de la République islamique, les origines et l’idéologie en sont retracées dans un chapitre fort utile. Le régime a usé d’une violence extrême dès sa création. Une répression très brutale s’est abattue dès les premiers jours de la révolution, contre la gauche qui voyait en l’ayatollah Khomeini un allié contre le Shah, contre les familles de fonctionnaires de la monarchie, etc. « L’hyperviolence » est la « clé de voûte du système politique iranien » : la République islamique a instauré la terreur sur la société iranienne, et usé de terrorisme à l’international. Aujourd’hui encore, alors que le pays traverse une grave crise économique, le régime finance, entraîne et assiste des groupes terroristes comme le Hezbollah, les Houthis et le Hamas. Les gardiens de la révolution aident le régime du dictateur syrien Bachar el-Assad dans sa répression.

Au-delà de la division entre chiisme et sunnisme, Khomeini a été très influencé par la doctrine des Frères musulmans, notamment de l’idéologue radical Sayyid Qutb. La « convergence idéologique » porte sur la nécessité de créer un État islamique, d’exporter la révolution, ainsi que les méthodes totalitaires et l’antisémitisme fanatique – l’auteur rappelle l’admiration que les fondateurs des frères vouaient au régime nazi1.

Sont traitées sans détour les méthodes terroristes du régime iranien, qui a une longue pratique du recours à la violence et à l’intimidation. Les démocraties sont vulnérables à la brutalité des méthodes du régime islamique, notamment à la menace terroriste et à la prise d’otages. L’arrestation d’Olivier Vandecasteele vient nous le rappeler : le travailleur humanitaire belge avait été pris en otage par le régime pour faire pression sur la Belgique, et l’échanger contre un agent du régime condamné pour l’organisation d’un attentat terroriste visant un groupe iranien d’opposition. Le régime détient encore de nombreux otages français, britanniques, etc. dont il se sert comme moyens de pression dans les négociations internationales, notamment sur son programme nucléaire. Les manifestations massives au nom de « Femme, Vie, Liberté » montrent que de nombreux jeunes Iraniennes et Iraniens ne supportent plus ce « monstre idéologique et mafieux » qu’est le régime islamique, mais l’appareil répressif du régime est solide. L’opposition démocratique tente de s’organiser, mais ne reçoit que peu de soutien des démocraties.

Écrit dans un style vif, bien documenté et sourcé, La face cachée des mollahs est un document indispensable pour comprendre le régime islamiste iranien.

Emmanuel Razavi, La face cachée des mollahs. Le livre noir de la République islamique d’Iran, Paris, Éditions du Cerf, 2024, 236 pages.

  1. Pour une analyse plus approfondie de l’influence idéologique du national-socialisme sur les fondateurs des Frères musulmans, on lira avec profit Djihad et haine des Juifs, de l’universitaire Matthias Kuntzel (L’Artilleur, 2015).

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