À table !

Pour nourrir votre esprit

Accueil - Exclus Web - Table - La Belgique, neutre ou laïque?

La Belgique,
neutre ou laïque ?

Anne Cugnon · Documentaliste au CAL/COM

Mise en ligne le 31 octobre 2022

Dans son nouvel essai, la philosophe Nadia Geerts, conseillère au Centre Jean Gol (MR), propose une réflexion sur les concepts de laïcité et de neutralité et s’attelle à contextualiser les débats politiques actuels autour de l’inscription de l’une ou l’autre de ces deux notions dans la Constitution.

« Géographiquement et culturellement située entre une France laïque et une Grande-Bretagne multiculturaliste, la Belgique se déclare quant à elle volontiers « neutre ». L’auteure expose dans un premier temps l’évolution historique de ce modèle « hybride », fruit d’un compromis entre libéraux et catholiques au lendemain de l’indépendance belge. De cet héritage résulte un certain flou. À ces yeux, le constat s’impose qu’en matière de gestion de la diversité religieuse « le texte constitutionnel aujourd’hui ne suffit plus ». Depuis plusieurs années, la place du fait religieux dans la société s’invite régulièrement dans l’actualité, qu’il s’agisse du port de signes convictionnels dans l’enseignement, de la neutralité d’apparence des agents de l’État ou encore de la question de l’abattage rituel sans étourdissement. Sans réponse du législateur, une judiciarisation croissante de ces questions s’installe, non sans poser un autre type de problème, en matière de séparation des pouvoirs, cette fois.

L’auteure analyse également l’évolution des positions des différents partis politiques en la matière, épinglant au passage l’ambiguïté de certains. Dans une dernière partie, elle indique les modifications à apporter, selon elle, à la Constitution. Certains principes devraient y être renforcés ou énoncés de manière explicite : le « primat de la loi civile sur la loi religieuse », « l’impartialité de l’État, traduite par l’exigence de stricte neutralité de ses agents, y compris dans leur apparence » mais également « la mission émancipatrice de l’enseignement officiel » afin de protéger la sphère scolaire de toute immixtion des prescrits religieux ou de prosélytisme.

Face aux défis actuels posés par une tendance à la « réappropriation de l’espace civique par le religieux », Nadia Geerts pointe qu’aucune religion n’est dénuée de velléité politique : il est par conséquent est impératif que « la loi ou la Constitution lui intime l’ordre de se tenir en dehors du champ du politique ».

Nadia Geerts, Neutralité ou laïcité ? La Belgique hésite, Waterloo, Luc Pire, 2022, 142 pages.

Partager cette page sur :