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Je dis ça, je dis rien

François Debras · Maître de conférences à l’Université de Liège et maître-assistant à la Haute École libre mosane

Mise en ligne le 21 novembre 2022

Saviez-vous que le gouvernement américain a, en 1917, créé un Committee on Public Information pour encourager l’opinion publique à soutenir la guerre ? Ce comité envoyait, tous les jours, à des organes de presse, des bulletins d’information jouant sur les instincts et les émotions. Les techniques d’influence ont été publiées, Crystallizing Public Opinion, et se sont retrouvées, plus tard, dans la bibliothèque de Joseph Goebbels. Américains, nazis… et si c’était aussi le cas pour la crise de la Covid-19 ? Enfin, je dis ça, je dis rien.

Photo © Shutterstock

Les théories du complot naissent de soupçons. Dans ce premier paragraphe, inspiré par la lecture du livre Le Réveil de Laurent Gounelle, rien n’est démontré, rien n’est analysé. Il s’agit d’une suite d’événements reliés entre eux par une histoire qui apporte linéarité, sens et implication personnelle. Chacun tire ses propres conclusions. On parle de biais de conjonction. Ce n’est pas parce que les nazis (sujet hautement symbolique et émotionnel) manipulaient l’opinion publique que nos dirigeants font de même. Et ce n’est pas parce que c’est possible que la réalité est au rendez-vous. En affirmant cela, je ne dis pas qu’il n’y a pas de jeu d’influence politique et économique mais que ces accusations nécessitent des faits et une démonstration. Qui sont les « puissants », les « élites cachées » ? Leurs intérêts sont-ils les mêmes pour tous ? Comment se mettent-ils d’accord ? Quelle formation à la manipulation ont-ils suivie ? Ces questions posent problème.

Les complots partent de faits réels, les liens établis entre eux tentent de faire sens, mais la causalité n’est jamais déterminée. C’est de l’implicite, du « bon sens ». Les citations sont nombreuses. « L’Histoire est écrite par les vainqueurs », « Un mensonge répété mille fois devient la vérité » ou celle d’Arthur Schopenhauer : « La vérité franchit trois étapes. D’abord, elle est ridiculisée. Ensuite, elle subit une forte opposition. Puis, elle est considérée comme ayant été une évidence. » Mais il ne suffit pas d’être dans l’opposition pour avoir raison. Il ne suffit pas d’énoncer mille fois un phénomène pour qu’il soit vrai. Et Schopenhauer n’évoque pas la vérité scientifique mais les idées nouvelles qui viennent modifier notre représentation personnelle du monde qui nous entoure.

Dénonciation et démonstration sont deux actes différents. Et, comme l’écrivait le romancier Jean-Yves Soucy, « c’est avec un œil critique qu’il faut lire les critiques ». Enfin, je dis ça, je dis rien.

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