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« J’ai moins peur
des attaques militaires
que des attaques cybernétiques
et sur l’opinion »

Propos recueillis par Sandra Evrard · Rédactrice en chef

Mise en ligne le 10 juillet 2023

Le 11 juillet 2023, un sommet exceptionnel de l’OTAN s’est tenu à Vilnius avec pour mission d’établir les nouvelles grandes lignes stratégiques de l’Alliance atlantique. L’Ukraine et la guerre avec la Russie seront évidemment au centre des débats. L’occasion de faire le point sur la situation et les enjeux à venir avec Wally Struys, économiste de la Défense à l’École royale militaire.

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Wally Struys, économiste de la Défense et professeur à l’École royale militaire.

Vous êtes professeur à l’École royale militaire et économiste de la Défense. Quel est le rôle de cette fonction ?

Le mot « défense » fait référence à la défense militaire, mais aussi à la sécurité en général. Ma spécialisation, c’est la macro-économie et la micro-économie en rapport avec la défense armée. En macro-économie, il y a par exemple l’organisation des forces armées, l’organisation de l’industrie de la défense, les budgets et les dépenses de la défense, les retombées économiques et industrielles.

Vous prodiguez aussi vos conseils aussi auprès de l’État ?

C’est une chose dont je ne peux pas trop parler, mais il m’arrive de donner des conseils. En Belgique, c’est assez rare ; j’ai plutôt donné des conseils à l’étranger.

Ces dernières semaines, vous avez exprimé dans les médias votre crainte que l’Occident se lasse de l’engagement, du support apporté à l’Ukraine, des propos notamment tenus par l’économiste Bruno Colmant.

Je n’ai pas l’habitude de prendre ce type d’initiative, mais j’ai souhaité réagir aux propos de Bruno Colmant qui disait : « Pourquoi allons-nous continuer à aider en envoyant des armes offensives ? » Je me suis d’abord dit : « Qu’est-ce qu’une arme offensive ? » Un pistolet, quand on l’utilise chez soi pour se défendre contre un cambrioleur, c’est défensif ; un même pistolet, quand je l’utilise pour attaquer un magasin, c’est offensif. C’est l’intention, c’est l’utilisation qui compte. Le carburant dans un char, c’est offensif quand on attaque l’ennemi et c’est défensif quand on se défend. Donc, cela n’a aucun sens. Ces armements sont là, en premier lieu, pour défendre les Ukrainiens. Ce sont eux qui ont été attaqués. C’est leur pays, ce sont leurs libertés, c’est leur société qui est attaqués. Et nous, quand je dis « nous » c’est l’Union européenne, c’est l’OTAN. Nous les défendons contre ces attaques et si ce n’est pas directement contre nous, c’est à nos frontières. Si demain Poutine réussit en Ukraine, après-demain, ce sera au tour de la Moldavie et de la Géorgie. Ce type de propos peut faire craindre que l’on se désintéresse du problème, que la population, que l’opinion publique se lasse de l’aide apportée. Ce n’est pas uniquement le cas en Belgique, mais partout évidemment. Je peux vous dire que les États baltes et la Pologne ont très peur ! Ils ont bien connu le régime soviétique qui n’est pas très différent de ce que Poutine fait aujourd’hui. Il y a eu une parenthèse avec Eltsine qui a amené un semblant de démocratie, mais, enfin, il n’était pas beaucoup pris au sérieux.

D’autant plus que ce n’est pas simplement la crainte d’une atteinte militaire. D’aucuns affirment que d’une certaine façon, la Troisième Guerre mondiale a déjà commencé puisque Poutine attaque nos démocraties. On parle de guerres hybrides, mais aussi d’une tentative de manipulation aux élections de pays démocratiques depuis plusieurs années. Ne sommes-nous donc pas au cœur d’une offensive beaucoup plus vaste que celle qui se déroule sur le terrain ukrainien ?

Effectivement, le concept de guerre a changé du tout au tout. D’abord sur le terrain. Nous nous sommes déjà laissé faire avec la guerre en Tchétchénie en 1999. La Tchétchénie, c’est l’Asie, on ne s’en occupait pas. Et puis il y a eu les attentats contre les pipelines, les gazoducs sous la mer, en 2006-2007. Nous avons laissé faire également. La Géorgie en 2008, l’annexion de la Crimée en 2014. Ça, c’était militaire, physique. Puis les attaques cybernétiques ont aussi commencé à la fin du siècle, dans beaucoup de pays, par exemple en Estonie, qui a été bloquée pendant trois jours par la Russie. L’Estonie, c’est l’un des pays, évidemment, qui intéressait fort Poutine, qui a alors d’ailleurs affirmé dans ce contexte : « Il est temps que les brebis rentrent au bercail. »

En fait, il a tout écrit, il a tout dit… On ne le prend pas au sérieux, mais il annonce toujours la couleur.

Lui ou ses ministres, en effet. Il est un peu mégalomane, il se voit dans la Grande Russie impériale. Cela fait sourire, mais sur le terrain, il y en a qui ne sourient pas, surtout du côté de l’Europe de l’Est. C’est là qu’ils sont le plus motivés évidemment. L’Estonie a déjà dépensé plus de 1 % de son PIB en aide à l’Ukraine. C’est le pays qui leur a apporté le plus de support au monde… Plus que les Américains, proportionnellement à leur PIB. Plus de 1 %, c’est époustouflant ! Ils sont très motivés. Et d’ailleurs, le centre cybernétique de l’OTAN, cela n’est pas un secret, a été installé en Estonie pour être plus proche de la source des attaques.

Les États baltes se sont aussi spécialisés dans l’expertise numérique d’une manière générale.

À juste titre, ils n’ont pas les moyens militaires. Ce sont des petits pays, et donc, ils ont demandé aux Européens de l’OTAN de venir surveiller leur espace aérien. Ce que nous faisons maintenant depuis neuf ans. Et du point de vue de leur spécialité dans la défense cybernétique, c’est concret sur le terrain, mais c’est plus abstrait d’un point de vue matériel, c’est pourtant une réponse à la guerre cybernétique. Il ne faut pas se leurrer, on ne peut pas que se défendre. Il faut attaquer les sources à partir desquelles nous sommes attaqués. C’est compliqué, mais quand on a de bons pirates informatiques…

Contrairement à ce que Bruno Colmant affirme, vous pensez que les Européens se sont laissé aller à une sorte de léthargie face à une paix qui était incertaine. On pensait qu’elle était acquise, mais ce n’est pas le cas. Et vous avez affirmé : « Notre dormance nous a rendus complices des actions de Poutine et du cauchemar ukrainien. » Pour maintenir la paix, ne faut-il pas toujours finalement se préparer à la guerre ?

C’est un vieil adage. J’ai coutume de dire que pour préparer la paix, il faut préparer la paix, pas la guerre. Et pour cela, il faut être pris au sérieux pour ne pas être attaqués, d’une façon ou d’une autre. Poutine s’est imposé, et à chaque fois, nous ne sommes pas intervenus, si ce n’est de façon diplomatique, très policée. Il s’est donc dit : « Ils se laissent faire, je vais continuer ». C’est cela que j’appelle la « dormance ». Un peu comme avant la Deuxième Guerre mondiale quand Chamberlain est allé voir Hitler pour régler la crise des Sudètes en cédant à ce dernier une région de la Tchécoslovaquie, scellant ainsi le sort de ce pays. Il est rentré à Londres en affirmant : « J’ai sauvé la paix. » C’est un peu aussi ce qui se déroule avec les diplomates : il y a eu beaucoup de réunions avec les Russes, avec Poutine, avant 2014 et après même après le début de l’offensive du 24 février 2022.

Poutine ne semble pas connaître le langage diplomatique. Certains le décrivent comme un homme qui prend les choses par la force.

Il trouve que nous sommes faibles. C’est un ancien du KGB. On ne travaille pas avec son logiciel, c’est un petit peu notre défaut aussi. Après la guerre froide, après la chute du mur de Berlin, pendant ce que j’appelle « la paix chaude », nous sommes partis avec l’idée que la Russie est un partenaire. L’OTAN avait même créé un Conseil OTAN-Russie qui se réunissait plusieurs fois par an. D’ailleurs, la troisième langue, non-officielle, utilisée dans les réunions de l’OTAN, c’était le russe. Un semblant d’approche amicale qui signifiait : « Nous ne sommes pas contre vous. Excepté pour les réunions militaires pures, vous pouvez assister à nos réunions pour voir que nous n’avons pas d’intentions agressives ». Poutine a même dit : « On va peut-être devenir membre un jour. » Ce n’est pas acté officiellement, mais il l’a dit. C’était pour nous endormir… Ce conseil a été arrêté en 2014, après l’annexion de la Crimée.

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Cet élément concernant l’OTAN est méconnu. On entend plus souvent que l’OTAN et la Russie, ce sont deux socles qui se regardent en chiens de faïence et que l’OTAN aurait aussi provoqués la Russie.

C’est le contraire. Nous l’aurions provoqué parce que les anciennes républiques soviétiques sont devenues membres de l’Union européenne et de l’OTAN, alors qu’il y avait une promesse de ne pas le faire. Cela n’est pas vrai du tout. La promesse était que l’OTAN ne s’étende pas vers l’est. Mais chacune de ces républiques est devenue indépendante. On ne peut pas empêcher un pays indépendant de devenir membre de quoi que ce soit.  Deuxièmement, Poutine avait dit : « Moi non plus, je ne peux pas m’étendre vers l’ouest. » Il avait reçu, dans le cadre de cet accord, toutes les têtes nucléaires qui étaient stationnées en Ukraine. L’Ukraine avait Sébastopol, le port de guerre le plus important dans le sud de la Russie. Nous lui avons dit : « L’Ukraine est indépendante, mais vous pouvez continuer à utiliser ce port ». Et donc il en a profité en 2014 pour aller plus loin et annexer la Crimée. Qu’avons-nous fait ? Rien. C’est à partir de ce moment-là que l’armée ukrainienne s’est rendu compte qu’elle n’était pas bien organisée et que les pays de l’OTAN ont commencé à l’entraîner. Et Poutine a cru pouvoir faire la même chose qu’en 2014 et être à Kiev en trois jours, mais l’armée ukrainienne s’était organisée cette fois-ci. Donc c’est lui qui a un peu provoqué le fait que les Ukrainiens se soient tournés de plus en plus vers l’ouest. Il faut également savoir qu’en dehors du Donbass, il y a encore des minorités russophones qui sont en train d’apprendre l’ukrainien parce qu’ils ne veulent plus, pour des raisons politiques, parler le russe. J’avais déjà connu cela dans l’ancienne Tchécoslovaquie. J’ai un diplôme de russe et j’y étais en 1995, envoyé par la Commission européenne pour analyser comment les industries militaires pouvaient être converties en industries classiques. Et en Tchécoslovaquie, je côtoyais des gens qui avaient fait leurs études dans des universités russes, qui parlaient russe, mais qui ne désiraient plus parler cette langue. Ils s’exprimaient très mal en anglais ou en allemand, mais ils ne voulaient pas parler le russe, c’était épidermique.

On entend souvent aussi – et vous abondez, je pense, dans ce sens-là – qu’aider Kiev, c’est nous assurer un avenir démocratique. On l’a évoqué pour tous les anciens satellites, mais cela pourrait-il aller plus loin par rapport à l’Occident ? Et notamment avec une pénétration des esprits grâce au numérique, pour miner les démocraties et pousser l’attrait pour un pouvoir plus fort ? Est-ce aussi un danger qui est pris en compte dans les tactiques mises en place depuis plus d’un an ?

Effectivement. Du temps de l’Union soviétique, ils finançaient un certain nombre de groupements antimilitaristes anti-OTAN, mais aussi par le biais des publications classiques à la radio. Maintenant sur les réseaux sociaux, on sait bien qu’on raconte n’importe quoi. Si j’ai envie de dire demain qu’en fait, les mathématiques nouvelles ont prouvé que deux plus deux ne font pas toujours quatre, il y en aura toujours pour le croire. Donc eux aussi profitent de cela, ils l’habillent d’une façon plus ou moins crédible et c’est ce qui est dangereux. Il existe vraiment une tentative de mettre en condition les opinions publiques en faveur de Poutine contre l’Union européenne, contre l’OTAN, contre nos démocraties parce qu’en fait de leur point de vue les vraies démocraties, ce ne sont pas les nôtres, c’est la leur. Il n’y a pas longtemps, dans un article publié dans plusieurs journaux était avancé l’idée que la meilleure façon de diriger un pays, ce n’est pas tellement la démocratie occidentale telle que nous la connaissons, mais que les gens ont envie d’être dirigés par un pouvoir fort. J’en suis tombé de ma chaise.

En effet, il y a eu plusieurs sondages qui abondent dans ce sens.

Oui, et d’où viennent ces sondages, d’où viennent les réponses données aux sondages ?

Vous pensez que les réponses sont manipulées ?

Il n’y a pas que les Russes, il y a aussi les Chinois qui attaquent nos démocraties.

Donc l’idée serait, en lançant ce type de sondages, de permettre à une minorité qui abonderait dans ce sens-là de faire tache d’huile ?

Oui et surtout les jeunes qui n’écoutent pas les actualités classiques, qui ne regardent que leur GSM, c’est plus facile pour eux d’accéder à ce genre de nouvelles là. S’il n’y a pas de contradiction, ce n’est pas évident. J’ai moins peur pour la Belgique, pour la partie occidentale de l’Europe, d’attaques militaires que de ces attaques cybernétiques et des attaques sur l’opinion.

Vous estimez cependant qu’il va falloir déployer davantage de moyens militaires aux frontières de l’Europe. Pourquoi ? Nos engagements actuels  ne sont-ils pas suffisants ?

L’année passée, j’avais été interviewé au mois de mars, un bon mois après l’agression en Ukraine, et j’avais dit qu’il fallait à nouveau procéder à des installations permanentes aux frontières de l’Europe. C’est parce que dans tous ces pays-là, excepté en Pologne, il n’y avait pas d’installations militaires crédibles ou suffisamment développées qui pouvaient résister à une attaque. Ce qu’il faut faire au niveau des frontières, ce n’est pas arrêter nécessairement l’ennemi – ce n’est pas toujours possible – mais gagner du temps pour organiser la défense derrière. Il faut savoir, ce n’est plus un secret aujourd’hui, que du temps de la guerre froide, la tactique de l’OTAN était de mener le combat retardateur depuis le rideau de fer jusqu’au Rhin, et de là, faire le combat d’arrêt. C’est un peu cynique de le dire, mais nous n’avions pas les moyens d’arrêter les Soviétiques aux frontières, à l’époque. Donc, nous planifions la manière de gagner du temps pour que les renforts puissent arriver sur le Rhin, là où on croyait pouvoir les arrêter. C’est un peu la même chose aujourd’hui : il fallait organiser le plus possible d’installations permettant de les freiner en cas d’attaques. Aujourd’hui, les Belges et les Néerlandais sont dans une brigade française de combats qui est installée en Roumanie. Nous étions déjà présents dans les États baltes et les Polonais, les Hongrois ont considérablement développé leurs positions terrestres et dans les airs aussi. Nous sommes donc à présent assez bien défendus.

L’OTAN augment aussi ses capacités depuis un an : les forces vont passer de 40 000 à 300 000 militaires, c’est bien cela ?

Oui. Là, il s’agit de l’ensemble. Depuis la fin de la guerre froide avec les forces mobilisables, nous avons rapidement atteint 40 000 hommes. Au sommet de Vilnius, l’OTAN va sans doute se mettre d’accord sur 300 000 soldats mobilisables rapidement.

Il ne s’agit donc pas de militaires qui seront installés en permanence ?

Non. Les infrastructures – c’est-à-dire les possibilités logistiques d’amener du matériel, du carburant, des munitions, etc. – doivent exister. Ainsi que les unités qui doivent pouvoir arriver rapidement vers l’est.

Et où trouver les unités ? Aujourd’hui, quelles sont les personnes qui souhaitent encore s’engager militairement ? N’est-ce pas un problème en Occident ?

Chez nous, il y en a très peu, mais demandez aux Finlandais ou aux Suédois. Ces deux pays ont aboli le service militaire, puis ils l’ont réintroduit. Les pays baltes, ce n’est même pas nécessaire de leur poser la question. Les Polonais, les Hongrois, les Bulgares, les Roumains, eux ils sont à la frontière est de l’Union européenne. Ils sont en première ligne en cas d’attaques. Eux, ils sont très motivés. Plus l’on va vers l’ouest, moins l’on est motivé, car nous ne sommes pas menacés physiquement. Et les autres menaces semblent très abstraites, on ne se rend pas compte du danger.

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Oserait-il ouvrir plusieurs fronts alors que cela patine en Ukraine ?

Il n’en a pas les moyens. Ce dont les Moldaves qui ont surtout peur qu’il avance en Ukraine et qu’il passe leur frontière. Pour l’instant, il n’en a pas les moyens et si nous continuons à aider les Ukrainiens, il n’y parviendra pas. Le risque, c’est évidemment un enlisement, avec une guerre de tranchées. Ou une solution, malheureusement pour les Ukrainiens, à la coréenne, avec un cessez-le-feu qui va durer cinquante ans ou plus.

Qu’est-ce qui aujourd’hui pourrait faire basculer la guerre, étendre sa portée ? On constate que des engins de type drones tombent en Croatie, en Pologne, de temps en temps, donc dans les frontières de l’OTAN. Et nous ne réagissons pas, si ce n’est par une petite mise en garde du style « N’allez pas plus loin ! ». On a l’impression qu’autrefois, ce genre d’événements aurait déjà pu déclencher un processus plus belliqueux.

Non, parce qu’autrefois c’est arrivé aussi, notamment pendant la guerre froide. Et tout le monde a gardé son calme parce que des accidents comme cela, ça arrive. Pour éviter de déclencher quelque chose de trop important, avant de réagir de façon très forte, on va réfléchir et relativiser un peu. Ce que risque de faire Poutine et c’est pour cela que les Moldaves et les Géorgiens ont peur, c’est d’attaquer ces pays-là.

Et des menaces permanentes.

Oui, bien sûr et une force d’interposition entre les Russes et les Ukrainiens, un no man’s land.

La menace nucléaire, notamment le positionnement des ogives en Biélorussie, comment peut-on lire à nouveau cette évolution ?

Je ne suis pas un spécialiste en politique nucléaire, mais il y en a qui contestent la réalité de cette installation. Deuxièmement, si elles sont installées, ce sont sans doute des engins tactiques et pas des ICBM (intercontinental balistic missile), des missiles balistiques intercontinentaux. Poutine a l’air – du moins peut-on le supposer – de faire une différence entre les engins nucléaires puissants et les engins tactiques. À l’OTAN, les Américains considèrent que tous ces engins nucléaires doivent faire partie des pourparlers de réduction des armes nucléaires.

Nous n’étions pas dans le cadre d’une guerre. Ici, si c’est utilisé comme arme finalement…

Oui, bien sûr. Mais on aurait pu aller là pour les aider lors de l’événement de Tchernobyl, mais l’Union soviétique avait refusé qu’on y aille.

Un dérapage, on s’entend, un sabotage aussi ?

Un sabotage, ça peut se faire, oui. Un petit commandant local qui en a marre et qui fait des bêtises, ça peut toujours exister. Nous n’allons pas intervenir militairement pour ça. Tchernobyl a eu lieu. Qu’a-t-on fait ? Pas grand-chose.

Les traités allaient dans ce sens-là.

Pour nous, oui. Poutine a l’air de faire la différence entre munitions tactiques qui correspondent plus aux engins utilisés dans le théâtre d’opérations locales dont il ne faut même pas parler, car on ne parle que des grandes bombes nucléaires. Cela peut constituer un danger local, régional, mais il ne va pas les utiliser chez nous.

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Imaginons le cas de figure d’une sortie des Américains de l’OTAN. Au niveau militaire, deviendrions-nous, dès lors, aussi très vulnérables ?

Je ne les vois pas sortir de l’OTAN, mais je les vois se désintéresser de l’Europe. Nous sommes trop divisés d’un point de vue militaire, même s’il y a officiellement une politique de sécurité et de défense commune, mais la défense relève toujours des souverainetés nationales et nous ne coopérons pas assez. Nous avons plus de militaires que les Américains en Europe, avec les 27 ensembles. Et quand il y avait les Britanniques, c’était largement plus. Mais nous ne travaillons pas ensemble, nous dépensons presque 50 % de ce que dépensent les Américains. Ceux-ci restent cependant des partenaires. En cas de besoin, ils viennent, ils l’ont prouvé, mais il faut que nous prenions davantage nos responsabilités, devenir un véritable pilier de l’OTAN.

L’OTAN deviendrait-il le bras armé de l’Europe ?

L’OTAN l’est déjà, de facto. Je crois que c’est Mark Eyskens (économiste et ancien homme politique, NDLR) qui a dit un jour : « L’Europe est un géant économique, un nain politique et un ver de terre militaire. » Le ver de terre est devenu un peu plus grand, mais pas beaucoup plus.

L’Europe, terrain de jeux des Américains, vous n’y croyez pas ?

Non, non. C’est fini cela. Parce que déjà Obama, en 2013, avait affirmé : « Nous allons retirer beaucoup de troupes parce que ce qui nous intéresse, c’est le Moyen-Orient et l’Asie. » Il est revenu en 2014 au moment des attentats terroristes, et évidemment lors de l’invasion de la Crimée. Mais au Congrès, les républicains ont commencé à refuser l’augmentation du nombre de milliards de dollars qui sont octroyés pour financer l’Ukraine, et pas seulement militairement. Parce qu’après la guerre, si elle se termine un jour, il faudra reconstruire le pays. Qui va le faire ? Les Américains et les Européens ? C’est aussi un problème qu’il faut expliquer à notre opinion publique. Nous avons le devoir d’aider les Ukrainiens à se reconstruire. Cela coûtera plus cher qu’une guerre et cela durera plus longtemps. Il faudra des générations pour cela. Qui va accepter ça ? Nous avons aussi des pauvres chez nous, pourquoi aider les Ukrainiens ? Voilà le danger effectivement : le défaut de solidarité. Et cela peut démarrer des États-Unis. S’ils réduisent leurs budgets, les Européens seront devant leurs responsabilités.

Dans la composante de l’état des lieux, une autre préoccupation, ce sont les élections américaines l’année prochaine. Si Trump ou un trumpiste devait accéder au pouvoir, sachant que l’ancien président voulait d’ailleurs quitter l’OTAN, cela pourrait être problématique pour l’Europe.

Il voulait quitter l’OTAN, et il trouvait que l’Union européenne ne ressemblait à rien. J’ai la faiblesse de croire que Trump ne va pas l’emporter, mais n’importe quel autre républicain risque de poser problème parce qu’ils ont de moins en moins envie de s’impliquer en Europe.

Vous songez au Vlaams Belang, j’imagine ?

Je ne peux pas le prouver, mais enfin, c’est une opinion assez diffuse que l’on entend parfois au café du commerce, sur les réseaux sociaux. Alors d’où ça vient ? Je ne suis pas un sociologue des médias, mais je me pose aussi la question. Y a-t-il des politiques qui sont derrière pour essayer d’en tirer profit plus tard ?

Le Vlaams Belang, la N-VA, quelles sont leurs positions à ce sujet ?

Ils sont plutôt militaristes, si j’ose dire, de façon exagérée… Ils sont contre l’Union européenne. Ils sont en faveur de l’autonomie politique flamande, avec une armée flamande plutôt qu’autre chose. Et il y a 13-14 ans, la N-VA voulait une armée orange, une armée fusionnée entre les Pays-Bas et la Belgique. Du côté flamand, il y aurait donc davantage de soutien politique, oui, mais pour les mauvaises raisons évidemment. Nous voulons jouer dans le cadre de la politique de sécurité et de défense commune européenne. Je crois que certains qui voient le fonctionnement politique du pays avec les sept gouvernements, les sept parlements (dont certains sont fusionnés) pensent que nous dépensons trop d’argent pour des résultats qui ne satisfont pas. Ils se disent donc : « pourquoi ne pas essayer autre chose ? » L’autre scénario c’est celui d’une démocratie confisquée par un petit nombre de personnes, voire par un dictateur. Certains disent : « Orbán en Hongrie, c’est formidable tout ce qu’il parvient à faire, à tenir tête à la Commission européenne. Et si on essayait cela ? »

C’est un peu la même histoire que celle des masques ça, non ?

Oui évidemment, mais à partir du moment où le budget de la Défense diminue, les décideurs politiques et militaires doivent faire des choix… Ce que l’on va devoir faire à présent, c’est augmenter nos stocks et aussi acheter du matériel pour satisfaire aux besoins. Pour cela, il faudrait 9 milliards, soit à peu près deux fois le budget de la Défense sur une année. D’autant que l’année passée, Alexander De Croo a promis à Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN, de consacrer 2 % du PIB à la Défense. Les Écolos ont conditionné leur accord à certaines conditions, à savoir la transition écologique et les priorités socio-économiques. Et le surlendemain, les deux Vice-Premiers flamand et francophone d’Écolo-Groen ont estimé que de toute façon, d’ici là, il y aurait de nouvelles priorités, de nouvelles situations géopolitiques, donc que cela n’allait pas se réaliser. Il y a donc déjà des réticences d’un point de vue politique et du point de vue de l’opinion publique, il y a tant de besoins qui ne sont pas suffisamment satisfaits… il n’y a qu’à voir les manifestations de tous côtés. Je crains donc beaucoup pour l’évolution future du budget belge.

C’est quand même un peu effrayant malgré tout.

Il faut bien se dire qu’au plus fort de la guerre, les Ukrainiens, en un jour, tiraient le nombre de munitions qui étaient fabriquées en six mois aux États-Unis. Tout le monde a utilisé les stocks et les stocks belges étaient déjà en dessous du minimum requis pour l’OTAN. Nous devions avoir un stock pour trente jours, nous avions des stocks pour trois jours.

L’accroissement des forces de réserve, mais aussi du matériel militaire, cela va coûter cher aux Européens et notamment à la Belgique. Comment cet accroissement du budget militaire risque-t-il d’être perçu par l’opinion publique ?

L’effort budgétaire de la Défense n’a fait que baisser entre 1983 et 2018. Fin 2018, nous avons commandé les F35 et depuis nous avons commandé les nouveaux systèmes d’armes, ce n’est donc qu’à partir de 2019 que les budgets ont commencé à augmenter. Et puis il y a eu le plan STAR (Sécurité/Service, technologie, ambition, résilience) de Ludivine Dedonder qui a été voté au Conseil des ministres un mois avant l’invasion. Ce n’est donc pas à cause de l’invasion que le plan STAR est né, ça date d’avant et le but était de faire en sorte que d’ici 2030, les moyens à la fois pécuniaires en matériaux et en personnel, augmentent. J’ai applaudi et j’ai rétorqué : « Mais, ça ne suffit pas, ce n’est qu’un rattrapage de ce qu’on a perdu ». Et j’avais dit également, avant l’invasion en Ukraine, qu’il fallait un plan STAR Plus pour quand même développer nos capacités. Maintenant, avec l’Ukraine, il faut un plan STAR Plus Plus. Le gouvernement avait budgétisé 1 milliard d’euros supplémentaires qui doivent être dépensés en trois fois, jusqu’à la fin de la législature, justement pour fabriquer des munitions, pour refaire nos stocks. On ne l’a pas fait, on a tout donné aux Ukrainiens. Les usines n’arrivent pas à suivre. Même aux États-Unis, ça n’a pas suivi…

Imaginons le cas de figure d’une sortie des Américains de l’OTAN. Au niveau militaire, deviendrions-nous, dès lors, aussi très vulnérables ?

Je ne les vois pas sortir de l’OTAN, mais je les vois se désintéresser de l’Europe. Nous sommes trop divisés d’un point de vue militaire, même s’il y a officiellement une politique de sécurité et de défense commune, mais la défense relève toujours des souverainetés nationales et nous ne coopérons pas assez. Nous avons plus de militaires que les Américains en Europe, avec les 27 ensembles. Et quand il y avait les Britanniques, c’était largement plus. Mais nous ne travaillons pas ensemble, nous dépensons presque 50 % de ce que dépensent les Américains. Ceux-ci restent cependant des partenaires. En cas de besoin, ils viennent, ils l’ont prouvé, mais il faut que nous prenions davantage nos responsabilités, devenir un véritable pilier de l’OTAN.

L’OTAN deviendrait-il le bras armé de l’Europe ?

L’OTAN l’est déjà, de facto. Je crois que c’est Mark Eyskens (économiste et ancien homme politique, NDLR) qui a dit un jour : « L’Europe est un géant économique, un nain politique et un ver de terre militaire. » Le ver de terre est devenu un peu plus grand, mais pas beaucoup plus.

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L’Allemagne, en revanche, réinvestit assez massivement dans son armée. Mais à part la France et le Royaume-Uni, quels sont les pays qui pourraient aider l’Europe à devenir crédible ?

Les pays de l’Est. Surtout ceux au plus près de la frontière de l’Est : les pays baltes. Ce sont des petits pays, mais ils doublent leur effort militaire. Si nous faisions cela ici, ce serait terrible, cela ne serait pas accepté par l’opinion publique. Les pays qui ont aussi terriblement augmenté leurs investissements, c’est la Finlande, la Suède, la Suisse… Des pays neutres qui sont finalement devenus candidats pour intégrer l’OTAN. En Suisse, la discussion a commencé. Ils ne vont pas le faire, selon moi, mais ils ont quand même demandé à l’OTAN voici deux mois de pouvoir participer aux exercices militaires conjoints avec les troupes de l’OTAN. L’Irlande se pose des questions sur son indépendance, sur sa neutralité. La question est aussi posée de passer de 27 à 37 dans l’Union européenne. Cela ne va pas se faire demain, mais cela signifie que de nombreux pays ont peur et aspirent à une sécurité économique et militaire. Des pays des Balkans sont aussi candidats à l’OTAN, mais c’est compliqué, cela risque de durer pour qu’ils remplissent les conditions d’entrée. Pour l’Ukraine aussi, par ailleurs, puisqu’il y a peu de chance qu’elle rejoigne l’Alliance lors du sommet de Vilnius les 11 et 12 juillet. Il pourrait cependant y avoir une espèce d’accord, une forme de protection renforcée, avec sûrement, la fourniture de matériel, et peut-être l’installation de bases dans la partie qui n’est pas en contact avec les Russes.

Cela va rendre Poutine fou, non ?

Oui, mais il a déjà été rendu fou à plusieurs reprises depuis l’année passée.

Pour revenir au sujet des dépenses financières belge et européenne, l’investissement dans le budget militaire a toujours été opposé au fait d’investir dans la Sécurité sociale et dans le bien-être en Europe… Cela ne risque-t-il pas de faire bouger le ratio ?

Non, pas du tout. Je réfute complètement cet argument. Depuis 1995, le COFOG (Classification Of the Functions of Government), sigle anglophone que l’on utilise comme classement des fonctions des dépenses des gouvernements, montre que la Défense est avant-dernière, avec 1,6 % de toutes les dépenses de l’État. Plus de 50 % sont dédiés à des dépenses sociales et même plus de 12% pour les Services généraux des administrations publiques. Ce qui court davantage un danger, c’est la sécurité interne. La police, la justice, les prisons, les pompiers…

C’est là que le budget pourrait être ajusté ?

Oui. D’un point de vue social, non, pas de danger. Nous sommes l’un des trois pays au monde qui en font le plus pour le social. C’est notre marque de fabrique, nous n’allons pas changer, mettre tout cela en péril. Au niveau fédéral, tenant compte des différents niveaux de prises de décisions qui ont été dévolus aux communautés et aux régions depuis 1989, ils essaient de développer de plus en plus leurs moyens financiers au détriment du fédéral. La part des dépenses publiques dévolue à la Défense reste très basse, soit 1,6 % seulement. Nous sommes parmi les derniers contributeurs en Europe.

Pour terminer, on fait souvent référence à la période de la guerre froide par rapport à ce que nous vivons aujourd’hui. Quels sont les éléments communs ?

Il n’y a pas d’éléments communs. Dans la guerre froide, l’armée belge n’était intervenue que cinq ou six fois en Afrique centrale pour sauver des Européens. C’est tout. Nous n’avons pas combattu, nous nous sommes préparés et nous n’avons jamais rien eu. Après la fin de la guerre froide, cela a commencé avec la guerre des Balkans, nous sommes intervenus plus de 200 fois pour des missions de maintien de la paix, des missions humanitaires, à l’exception des F16 envoyés pour des missions de combats. Pour le reste, nous sommes uniquement intervenus pour apaiser les choses, les régler. C’est pour cela que je parlais précédemment de « paix chaude ». Il n’y a rien de commun parce que ce qui se passe maintenant, c’est une guerre. Pendant la guerre froide, il n’y a pas eu de combats en Europe comme maintenant. C’est cela qui est inquiétant. Depuis le début de la guerre, il y a eu différentes lignes rouges à ne pas franchir et qui l’ont été. Maintenant, nous allons enfin envoyer les F16, qui vont arriver en Ukraine en septembre. Si au mois de mars de l’année passée, nous avions envoyé des F16, Poutine aurait frappé l’OTAN. Là, il ne le fera pas. Pourquoi ? Parce que nous avons commencé à augmenter notre participation graduellement. Les chars étaient une ligne rouge à ne pas franchir non plus. À chaque fois, Poutine se rend compte que ses propres actions provoquent des réactions. Et tant que l’OTAN n’attaque pas la Russie…

Est-ce cela ou est-ce parce que ça s’est déjà tellement rapidement enlisé avec une sous-estimation de ses moyens militaires, mais que le jour où il sera mieux équipé, cela pourrait changer ?

Non, parce qu’il y a un certain nombre de matériaux de base qu’il n’aura pas en quantités suffisantes…

Avec l’aide de l’Iran ?

Là aussi, c’est limité. Les États-Unis et l’Europe aussi sont également en train d’augmenter leurs capacités de production.

La Chine a juré qu’elle n’interviendrait pas, mais peut-on la croire ?

La Chine n’interviendra pas. En politique, ils sont plus ou moins neutres. Ils achètent du pétrole et du gaz évidemment parce que l’économie russe tourne quand même encore un peu, mais militairement, je ne pense pas. En revanche, les Coréens du Nord leur vendent des armes… Je crois que le jour où il y a un ICBM coréen qui part, c’en est fini. Ce qui est plus dangereux, c’est Taïwan. La Chine regarde la situation ukrainienne de très près, c’est intéressant pour elle. Et pourquoi toutes ces manœuvres navales et aériennes autour de l’île ? Pour observer les réactions. Les Américains envoient un porte-avions dans les parages, donc il y a une dissuasion quelque part. L’autre grand problème, c’est l’attaque éventuelle de la Crimée par les Ukrainiens. Poutine a dit : « la Crimée fait partie de la Russie », donc l’attaque de la Crimée, c’est une attaque de la Russie. C’est encore une ligne rouge. Si la contre-offensive réussit à l’Est, ils vont essayer d’avoir la Crimée aussi. Comment la Russie va-t-elle réagir ? Une nouvelle ligne rouge va-t-elle être franchie ou pas ? À chaque fois, nous pouvons nous poser la question.

Imaginons qu’une guerre soit déclenchée entre les États-Unis et la Chine, l’article 5 du Traité de l’Atlantique Nord pourrait-il être invoqué ?

Si un pays de l’OTAN est attaqué, oui ; dans le cas contraire, non. Il y a aussi l’article 3 qui demande à tous les pays membres de se préparer, de s’assurer les moyens – en matériel, en hommes, en munitions, en armes – permettant d’intervenir dans le cadre de l’article 5.

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Le territoire doit-il être attaqué pour le déclencher ?

Le maximum fait par le passé a été d’intervenir aux frontières. L’intervention de l’OTAN a été sollicitée en tant que telle dans la guerre civile yougoslave, mais avec l’accord de l’ONU. C’est une exception, cela ayant été considéré à l’époque comme une menace de par la proximité de l’Italie. L’ancienne République yougoslave, la Slovénie était particulièrement visée par ce que c’était la république la plus riche à l’époque.

C’est en cela que l’on pourrait faire une petite comparaison avec la guerre froide où l’on a l’impression qu’il y avait une chape de plomb qui pesait sur les différents pays avec toute cette crainte de l’enclenchement, du pas de trop ?

Oui, la dissuasion nucléaire existe toujours également, mais malgré cela, il y a une guerre. Donc les autres formes comme la guerre hybride sont là et elles sont utilisées peu ou prou. Nous verrons comment cela va évoluer, mais tout le monde se prépare. Et les pays neutres le sont de moins en moins, ils se préparent aussi. La Suisse s’arme davantage. L’armée suisse, à côté de l’armée belge, c’est autre chose !

Pour les pacifistes et les amoureux de la paix, c’est quand même une déconfiture terrible.

Non. Moi, je suis pacifiste, je suis pour la paix, mais j’ai toujours considéré qu’il n’y avait qu’une façon de préserver la paix : avoir une défense armée. Comme je l’ai dit en 2015, Jan Palach qui se mettait torse nu devant les chars soviétiques « Vous ne passerez pas », eh bien ils sont passés… Cette espèce d’amour romantique pour la résistance passive, cela ne marche pas, malheureusement. J’aimerais bien une défense sans armée, mais non. L’armée, c’est comme les pompiers, les policiers. S’il n’y avait pas d’incendies, nous n’aurions pas besoin de pompiers ; s’il n’y avait pas de crimes, nous n’aurions pas besoin de policiers ; s’il n’y avait pas de maladies, nous n’aurions pas besoin du secteur médical ; s’il n’y avait pas de guerres, s’il n’y avait pas de tentatives de s’accaparer ce que les autres ont, nous n’aurions pas besoin de nous défendre non plus. Et je crois que, malheureusement, l’actualité prouve que nous avons besoin d’une défense armée.

Crimes de guerre en Ukraine

Libres, ensemble · 10 juin 2023

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