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Vous dites?
Cent ans d’associatif en Belgique… Et demain ?
Une opinion de Geoffroy Carly · Directeur des centre d’entraînement aux méthodes d’éducation actives (CEMÉA)
Mise en ligne le 12 avril 2022
La récente intégration des associations dans le Code des sociétés et des associations (CSA) en 2019 est passée presque inaperçue. Pourtant, ce rapprochement « contre nature » de l’entreprise et de l’ASBL constitue le franchissement d’un cap symbolique (et pratique) important : la désanctuarisation de l’associationnisme pour l’intégrer à la marche du monde, présentée comme inéluctable, qui transforme tout en produits de consommation…
Illustration © Shutterstock
Entendons-nous d’abord sur les associations que nous visons. La démarche du Collectif21 n’embrasse pas l’ensemble des associations régies par la loi de 1921. La définition du champ associatif qui se limite au « véhicule juridique » de l’ASBL s’avère bien trop ouverte. Pour nous, il s’agit d’actions collectives qui soutiennent l’intérêt général dans une relation d’indépendance et de « complémentarité critique » avec les pouvoirs publics. Nous les retrouvons essentiellement dans le champ social, de la culture, de la santé, de la jeunesse… inscrites dans l’histoire qui a conduit à la loi de 1921 (mouvements sociaux, luttes syndicales, auto-organisation du peuple pour apporter des réponses aux questions sociales et pour s’émanciper de la tutelle patronale ou étatique).
Nous situons donc les associations en tant que composante démocratique d’un État, poursuivant des missions d’intérêt public (révéler des injustices, faire émerger des questions collectives non prises en charge, œuvrer aux transformations sociales…). Ou, comme l’écrit Jean Blairon : « Il y a ʺde l’associationʺ lorsque des protagonistes veulent lier leur sort pour faire cesser une domination culturelle ou pour ouvrir de nouveaux possibles en matière de démocratie culturelle, qu’ils considèrent comme le socle de toute vie en société. » 1 Et pour s’inscrire dans la durée et la réalité, l’association ne peut ni se cantonner à l’entre-soi ni planer dans la pureté. Elle doit se confronter aux autres, mettre les mains dans le cambouis, commercer avec le monde et habiter les dilemmes moraux qui en résultent.
Un certain nombre d’associations, inquiètes tout de même de cette transformation présentée comme quasi naturelle, ont voulu revenir sur ce qui « fait association » pour calibrer l’oraison funèbre de la loi de 1921 sur les associations, texte en toute fin de vie puisque toutes les structures devront avoir rejoint le CSA en 2024. Nous avons dès lors mis sur pied un site Web et organisé des rencontres/débats pour appréhender le fait associatif aujourd’hui sous différentes facettes : l’économie, la pilarisation, l’action en temps de crise, les travailleurs du secteur, le rapport aux pouvoirs publics, l’engagement et le militantisme, la participation et/ou l’instrumentalisation des publics avec lesquels les associations travaillent…
La quête d’une culture politique propre à l’associatif, qui peut se transmettre, vivre et se développer est d’autant plus importante que le secteur associatif a vécu et continue d’être confronté à de profondes mutations ces dernières années, mêlant professionnalisation, une tendance au regroupement en grandes entités (et fragilisation des plus petites structures) et des modes de travail (et de contrôle) qui poussent au formatage des pratiques. L’un des principaux risques est une perte d’hétérogénéité du secteur et une profonde déconnexion avec certains publics, probablement les plus éloignés de la participation à la vie de la cité.
Les balises d'une future identité associative
Les travaux ont jusqu’ici mené à différents débats recensés sur le site Web du Collectif21, de même qu’un documentaire coproduit avec le Centre vidéo de Bruxelles, 2121 Hypothèses Associations et qu’un livre en collaboration avec l’agence Alter. Des contacts politiques se sont également noués pour envisager les modes de protection à mettre en place à l’égard des associations, pour leur assurer leur autonomie et leur liberté. Le Collectif21 vous invite à vous saisir de ces enjeux avec ces outils pour appréhender le fait associatif dans sa complexité.
- Jean Blairon, « L’associatif est-il (encore) manifestable ? », dans Intermag, septembre 2020, p. 16.
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