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L’écologie sous le prisme philosophique
Sandra Evrard · Rédactrice en chef
Mise en ligne le 18 décembre 2023
Même s’il demeure intéressant et crucial d’informer le plus large public possible sur les enjeux liés aux problèmes environnementaux, changer de récit et de perspective permet de maintenir l’intérêt pour le sujet auprès des citoyen.ne.s averti.e.s. Ainsi, en appelant la philosophie à la rescousse pour analyser le lien que l’humain tisse avec la planète, notre collègue Guillaume Lejeune propose une intéressante grille de lecture. Les différents courants philosophiques qui s’emparent de la question écologique étayent en effet la littérature et les débats depuis plusieurs décennies. L’animateur philo du CAL/Charleroi revient sur les principaux d’entre eux, analyse leur logique et leur intérêt pour sortir des écueils actuels. Ces derniers sont nombreux et la vision des auteurs phares, résumée ici, permet de se mettre à la page de la dialectique philosophique qui traverse cette thématique. De l’écologie critique qui vise à réformer les comportements humains à l’écologie qui privilégie d’agir sur les mêmes comportements pour préserver la nature, la relation de l’homme d’avec cette dernière est constamment questionnée. De même que la valeur intrinsèque de la nature, sa protection, avec ou sans l’humain.
Guillaume Lejeune nous rappelle aussi que face à la problématique environnementale, la vision occidentale, marquée par la culture judéo-chrétienne fait partie intégrante du problème, puisqu’elle fait de la nature une simple ressource à exploiter ; la religion chrétienne en particulier, établit un divorce entre l’homme et la nature, « ce qui est en partie responsable de la crise actuelle », nous dit l’auteur. « Avec le christianisme, il y a une forme d’exclusivité qui prévaut. On pense l’unité du monde à partir d’un principe qui lui est extérieur. »
L’ouvrage pose des questions intéressantes : y a-t-il une nécessité humaine à exploiter la nature comme on le fait ? La domination de la nature est-elle liée à une organisation sociale marquée par la soumission de la femme, l’exploitation des plus pauvres et une logique de concurrence ? Y a-t-il une convergence de l’écologisme et des luttes sociales ? Mais il met aussi en garde : la rupture multifactorielle de l’homme d’avec le monde (de par la bourse qui déconnecte des richesses réelles ou la bureaucratie qui devient une logique interne, pour ne citer que ces exemples), sa marginalisation, risque d’aboutir sur un système qui devient sa propre fin. Il forme alors un « monstre froid ». Le lien est rompu. Que se passe-t-il alors ? « L’individu accepte de se fondre dans la masse, explique l’auteur, il se révolte ou il se replie sur une communauté qui fait sens pour lui. » Face aux enjeux soulevés par l’écologie, tous courants ou partis-pris confondus, il s’agit donc de remettre de la valeur dans notre appréhension du monde. Et d’accorder nos actions en conséquence.
Guillaume Lejeune, Les philosophies de l’écologie, Paris, Ellipses, coll. « Apprendre à philosopher avec », 2023, 195 pages.
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