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Tox en toc
Vladimir Poutine
et les usines à trolls
François Debras · Professeur associé à l’ULiège et maître assistant à l’HELMO
Mise en ligne le 21 mai 2024
En Russie, les trolls sont devenus de véritables soldats de la guerre de l’information. Certains, regroupés sous l’appellation « Cyber Front Z », ciblent les dirigeants occidentaux, les médias et toute forme d’opposition et se font le relais d’une propagande pro-Poutine et pro-Russie, notamment dans le cadre de la guerre en Ukraine.
Photo © Marko Aliaksandr/Shutterstock
Un « troll » est une personne qui utilise les réseaux sociaux et des plateformes de communication pour perturber des discussions et provoquer des conflits par la diffusion d’insultes, de moqueries ou de fausses informations. L’objectif du troll, c’est de susciter des polémiques. Il cherche à faire réagir et pour cela, il met en opposition des groupes et des communautés. Le troll est en guerre contre les idées toutes faites. Il se présente en résistant contre la pensée dominante. Son activité sur Internet peut tantôt favoriser l’esprit critique, le débat d’idées, tantôt déstabiliser, manipuler, attaquer et dénigrer. Mais « troller », c’est aussi un jeu, une pratique, une forme d’humour.
Récemment décédé dans un crash d’avion, Evgueni Prigojine, ancien oligarque russe et ex-fondateur du groupe paramilitaire Wagner, a fondé l’Internet Research Agency (IRA) à Saint-Pétersbourg. Tous les jours, des centaines de jeunes travailleurs y sont payés pour publier des commentaires et des messages en ligne, créer des discussions fictives et des démonstrations erronées dans le seul objectif de mettre en avant un argument final, une position idéologique irréfutable. Et à quoi ont servi et servent toujours ces trolls ? À interférer dans la campagne présidentielle américaine de 2016 ; à encenser le président Vladimir Poutine, à dénigrer Alexeï Navalny, principal opposant politique en Russie, décédé le 16 février 2024 dans des circonstances qui demeurent floues à l’heure d’écrire ces lignes ; à discréditer le chef d’État français Emmanuel Macron ; à critiquer Olaf Scholz, chancelier fédéral d’Allemagne ; ou encore à amplifier les théories du complot issues de QAnon…
Leurs méthodes et actions qui peuvent paraître simples sont toutefois souvent difficilement décelables. Les trolls utilisent des photos d’archive et des modèles de publication pour republier à plusieurs reprises le même commentaire dans des fils de discussion sur Facebook, YouTube, TikTok… Les opérations sous de « faux drapeaux » ou de « fausses bannières » sont récurrentes. Créer un faux profil ukrainien pour partager des images fausses et ensuite dénoncer la propagande ukrainienne est une pratique fréquente.
Si la propagande d’État a toujours existé en temps de guerre, aujourd’hui, les réseaux sociaux permettent de toucher directement et immédiatement des milliers voire des millions d’internautes. La guerre n’est plus uniquement territoriale. Elle s’est, elle aussi, numérisée.
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