Des mines et des femmes

Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la Belgique a besoin de bras pour gagner la « bataille du charbon ». L’Italie, quant à elle, manque de matière première et n’a plus vraiment de travail à offrir à sa jeunesse. C’est ainsi que naîtra cette histoire belgo-italienne qui verra des milliers d’Italien.ne.s débarquer dans le plat pays.

Loin de cette froide analyse socio-économique, cette immigration italienne en Belgique est surtout un récit collectif, qui mêle des destins familiaux et qui a façonné notre royaume. Comme souvent à cette époque, un phénomène migratoire est d’abord une histoire de départs, d’arrivées, mais aussi de dur labeur. Mais aux côtés ces premiers hommes, ces minatori dont la catastrophe du Bois du Cazier dévoilera les pénibles conditions de travail, il y a des femmes qui ont entrepris ce voyage, laissant derrière elles leur terre, leur famille et leur enfance.

C’est leur récit que Les filles de la destinée. Paroles de « Commare » de Mons et du Borinage nous invite à découvrir. Annamaria, Concetta, Fabienne, Margherita, Lara… témoignent de leur vécu et de leur parcours. Elles nous emmènent sur leurs traces, au départ des Abruzzes, des Pouilles ou encore de la Lombardie. Durant ce voyage, elles nous relatent les difficultés auxquelles elles ont dû faire face en débarquant dans ce pays inconnu, et l’on perçoit rapidement le rôle fondamental qu’elles ont joué dans la structuration de cette communauté italienne, malgré le racisme et le sexisme qui étaient encore plus prégnants qu’aujourd’hui.

Avec cet ouvrage court mais d’une force terrible, la régionale de Mons-Borinage de PAC donne la parole à quinze femmes qu’on est tenté de qualifier d’exceptionnelles mais qui symbolisent en réalité l’ensemble de leurs semblables dans toute migration. À travers un objet de leur choix, ces « filles de la destinée » nous (ra)content leur histoire. Humblement. Magistralement. Au terme du livre, la seule envie qui nous vient est de rencontrer l’une d’elles, Rosalia Falzone, dont l’expression favorite est « Ca semu… » (« On est ici, on n’est pas grand-chose »). Ô que si Rosalia, vous êtes puissantes. Simplement puissantes.